Il faut être là ou sont les internautes

C’est très bien d’être visible sur Google. Encore faut-il y rencontrer son public. Car si aujourd’hui les internautes utilisent encore massivement les moteurs de recherche, rien ne prouve que ce sera encore le cas d’ici quelques années.

machine ia serveur
Une image générée par l’IA Midjourney

En tant que SEO, il est facile de ne voir le monde qu’au travers des outils de recherche mais, si cette situation est confortable, elle évite aussi de poser les questions qui fâchent.

Les adolescents et les jeunes adultes sont les consommateurs de demain. Que font-ils sur Internet ? Quelle est leur porte d’entrée ? Comment recherchent-ils ?

Ces internautes sont massivement connectés. Mais pas forcément très éduqués vis à vis des technos. Et surtout, ils préfèrent le contenu court, snackable, facile à consommer. Ça correspond parfaitement avec ce que fournissent les réseaux sociaux. C’est d’ailleurs là qu’ils sont. Pour les loisirs mais aussi lorsqu’il faut initier une recherche d’info.

Google et les emails sont des outils d’un autre temps. Les internautes doivent s’en servir et pour les plus jeunes ce n’est ni un réflexe ni un plaisir.

Regardez autour de vous lorsque vous êtes dans un transport en commun, un samedi en ville ou à n’importe quel endroit ou les gens doivent attendre. Ils ont en main leur téléphone et regardent des vidéos, scrollent, regardent des vidéos, scrollent, regardent des vidéos, scrollent… Parfois un jeu. Éventuellement, un itinéraire, une consultation d’avis, un like ou un court message. Très rarement une recherche sur Google ou un email.

Échanger pour de vrai est aussi pénible. Plutôt que de téléphoner ou écrire une demande, un rapide texto ou une interpellation sur un support social est plus facile. Ça colle parfaitement avec la déferlante ChatGPT qui permet de formuler sa requête en langage naturel. Le glissement de sujets est un peu facile mais nous sommes désormais matures pour poser des questions à un robot et « discuter » avec lui. La véracité et la justesse de l’information ? Les utilisateurs ne sont pas bêtes, c’est un problème mais suivant l’importance de la demande, une information approximative suffit amplement. D’ailleurs, et ce n’est pas propre aux plus jeunes, une information rapide, simple et demandant peu d’efforts sera très souvent privilégiée face à une information plus qualitative mais plus pointue. Tout est question de contexte.

Si les jeunes générations délaissent les outils de recherche, c’est aussi parce que l’information qu’on y trouve n’est pas si bonne que ça. Quand on voit ce qui remonte sur les SERPs, on ne peut que blâmer les collègues SEO et rédacteurs qui sont efficaces mais qui n’apportent pas vraiment de qualité. La course à toujours plus de contenus n’apporte pas tant de contenu utile à l’internaute. Et ce n’est pas la production de contenu SEO IA qui apportera de solutions à long terme. Produire plus n’est pas produire mieux.

Face à ces évolutions d’usage et de technos, les moteurs de recherche sont piégés. En plus d’être des bibliothèques de l’Internet (le fameux « organiser l’information mondiale » de Google), ils doivent déjà fournir à chacun la bonne réponse, au bon moment avec assez peu de contexte.

Les moteurs ne se sont pourtant pas reposés sur leurs lauriers. Google avait bien senti le truc avec ses projections à 20 ans et sa transformation souhaitée de moteur de recherche à moteur de réponse. L’enrichissement des SERPs en est une des applications concrètes. À l’époque j’avais aussi été bluffé par les réponses fournies par Wolfram Alpha. Et vous ?

Sur le volet social Discover est une partie de la réponse côté Google et il le fait très bien mais est-ce suffisant ? Les efforts des moteurs sont importants mais les résultats certainement moins bons que ce que l’on peut trouver sur les réseaux sociaux.

Autre problème pour les moteurs, le contenu social n’est pas forcément facile à repérer et indexer. Comme il est très facile de publier dessus, beaucoup de contenus à forte valeur ajoutée se trouvent désormais sur les plateformes sociales. Pour les utilisateurs, à quoi bon créer un site web ou un blog alors que les outils sociaux et les app permettent de publier en quelques clics ?

La vérité, c’est que les réseaux sociaux contiennent aussi énormément de contenu inutile. Pour un moteur, comment choisir le contenu social qui mérite d’être indexé ? Ça demande des ressources considérables d’explorer et de qualifier ces contenus. Encore des ressources.

Toujours côté moteur, est-ce vraiment la bonne décision que de renvoyer vers des réseaux sociaux qui vont détourner les utilisateurs de la recherche ? Même si la valeur est plus grande sur les réseaux et outils sociaux, jusqu’ou faut-il envoyer du trafic à la concurrence ?

Et si on ajoute à la situation, la forte dépendance de certains acteurs à une forme de publicité du passé (le display, les liens sponsorisés), on a pas mal d’indices indiquant de grands bouleversements à venir.

Le constat est simple : les usages évoluent. Les nouveaux internautes n’ont plus Google comme porte d’entrée sur Internet.

Questions en vrac pour les années à venir :

  • Les sites web sont-ils encore utiles ?
  • Comment se préparer à la révolution de l’IA qui va permettre d’obtenir des réponses sans passer par les sites web ?
  • Comment rester visible sans la recherche web ?
  • Quel business-model pour les éditeurs de contenus et de façon plus générale pour tous ceux qui publient de l’information en ligne dans le but d’être vu et connu ?
  • Ou publier son contenu ?
  • Faut-il accepter de perdre son indépendance (être maître en publiant sur son site) pour apparaître là ou sont les internautes ?
  • Qui/quoi va remplacer Google ?

Le SEO n’est pas mort mais il va devoir se recycler une nouvelle fois et cette fois de façon bien plus importante. Quand aux moteurs de recherche et particulièrement à Google, ils risquent de vraiment tanguer dans les années à venir s’ils n’arrivent pas à faire leur mue.

Visuel : Wesley Fryer avec MidJourney

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