J’ai attaqué un confrère

Ça fait depuis 2009, je crois, que j’utilise la marque Tyseo. J’ai déposé il y a de nombreuses années ce nom à l’INPI. Je m’étais déjà fait enquiquiner par une entreprise allemande qui possédait la marque Tenseo et j’avais découvert tout un monde que je ne connaissais pas autour de la surveillance des marques.

justice

Depuis, j’ai renouvelé la marque et je me suis fait accompagné par un cabinet spécialisé en propriété intellectuelle et en droit des marques. À cette occasion, je me suis rendu compte que mon premier dépôt était très basique. Face à un spécialiste, la marque n’aurait pas fait long feu. Maintenant tout est carré.

Bref, il y a quelques mois, je suis tombé sur un confrère parisien qui utilisait quasiment le même nom de marque. Seulement la première lettre changeait.

Ici, on avait :

  • une proximité immédiate de marque avec la même longueur, la même forme, la même sonorité ;
  • le même métier ;
  • et donc un risque fort de confusion et/ou de contrefaçon de marque et/ou de concurrence déloyale.

Je devais réagir. Via le cabinet que j’avais précédemment missionné pour renouveler ma marque, un courrier de notification de violation de propriété intellectuelle a été envoyé. Une trentaine de pages tout de même avec des annexes contenant notamment des décisions de justice similaires montrant que la situation était certainement perdue d’avance pour l’autre partie.

Ma demande était simple : l’entreprise en face ne devait plus utiliser la marque et me céder le nom de domaine. Ils ont accepté la demande.

Je ne suis pas certain que ça aurait été le cas si je n’avais pas mis en œuvre l’artillerie lourde et si je l’avais simplement contacté par email / téléphone.

Sur le fond, je devais le faire. Mon avocat m’avait expliqué que si je laissais faire, c’était une négligence de ma part et que ça aurait pu rendre caduque ma protection actuelle : si je laisse seulement un tiers utiliser ma marque et que je ne réagis pas, je créée un précédent qui pourrait être utilisé contre moi. Je devais faire cette action pour protéger ma marque.

Sur la forme, j’ai trouvé la démarche agressive et implacable. Je me suis protégé derrière le cabinet qui a fait tampon et qui a mené les échanges.

Avant de me lancer dans cette action, j’ai aussi pensé, que l’autre partie allait être pas mal chamboulée : je la force à changer son nom, son site, ses présences sociales, sa communication… Ça ne fait jamais plaisir de recevoir un courrier d’avocat. Mais si je ne le faisais pas, j’aurais dû en supporter les risques. Fallait-il ne pas le faire ?

Au final, c’est plutôt un sentiment ambivalent que je retiens de cette histoire :

  • J’avais le droit pour moi et en tant que responsable de mon entreprise je ne pouvais pas ne pas agir ;
  • C’est une banalité, mais bien accompagné, on va plus loin. L’apport du cabinet a vraiment été indispensable ;
  • Pour le côté humain, on repassera. Ce n’est pas le type de relation que j’aime avoir avec les autres même si c’est un concurrent ;
  • Protéger sa marque demande d’être actif. Une approche purement défensive n’est pas suffisante. Heureusement, les cabinets sont équipés pour surveiller les dépôts et peuvent alerter en cas de souci potentiel. Évidemment, c’est payant.

Quand je vois avec quelle légèreté les acteurs du web et du SEM et tout particulièrement du SEO abordent les sujets liés au droit, je me dis qu’il y a vraiment un paquet d’efforts à faire. Nombreux sont ceux qui sont en situation de risque : RGPD, rachat de domaines, « réutilisation » de contenus, IA, achat de liens… C’est de la gestion de risque mais pour pouvoir prendre les bonnes décisions, il faut savoir estimer le risque.

Si la situation se reproduit, j’agirai de la même façon. Pas de gaieté de cœur mais je le referai. Et vous, quelle aurait été votre approche ?

Photo : WilliamCho

Une réflexion sur « J’ai attaqué un confrère »

  1. Tu as bien fait !
    Une fois que l’on a pris l’initiative de défendre sa marque, il est essentiel de faire valoir ses droits légalement.
    Je me rappelle d’une conversation que j’ai eue avec un conseiller de l’INPI, qui m’expliquait qu’une entreprise qui réagissait après plusieurs années avait peu de chances de remporter sa bataille juridique.

    Pour le côté humain, tu as peut-être enseigné quelque chose à ton confrère parisien 😉
    C’est vrai que tout ce côté juridique est compliqué et déplaisant.

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